Afin de vous offrir une service optimal, ce site utilise des cookies.
En utilisant notre site, vous acceptez notre utilisation des cookies. En savoir plus
Air Canada cherche-t-elle à prendre le contrôle de VIA Rail? Des experts en transport préoccupés
Une organisation de défense des droits des usagers des transports s'inquiète de l'implication d'Air Canada dans le processus d'appel d'offres pour un projet de train à grande fréquence (TGF) en Ontario et au Québec.
Le mois dernier, le consortium Cadence – dirigé par CDPQInfra et AtkinsRéalis, anciennement SNC Lavalin – a révélé qu'Air Canada avait rejoint leur équipe, aux côtés de l'opérateur français SNCF Voyageurs, pour une offre de TGF, avec une date limite fixée au 24 juillet.
Si cette offre est retenue, Air Canada et ses partenaires obtiendraient une concession d'exploitation de plusieurs décennies pour tous les services de train de VIA Rail entre le Québec et Windsor.
LIRE PLUS – Air Canada se joint à l’équipe Cadence pour le projet de TGF
Conflit d'intérêts et concurrence
Transport Action Canada, qui plaide pour les passagers et le transport durable, critique l'implication d'Air Canada, affirmant qu'elle soulève des questions de conflit d'intérêts, de concurrence et de transparence.
« Si Cadence est sélectionné comme consortium gagnant et devient le "Partenaire privé de développement" pour le train à haute fréquence d'ici la fin de l'année, une concession d'exploitation de plusieurs décennies pour tous les services actuels de VIA Rail dans le corridor Québec-Windsor et les nouveaux services TGF seront entre les mains d'Air Canada et de ses partenaires, avec le transfert au secteur privé se produisant au cours de la période de co-développement de plusieurs années », a écrit l'organisation dans un billet de blog le 6 août.
Le groupe note qu'un souci commun parmi les passagers est que voyager avec VIA Rail ressemble beaucoup à prendre l'avion en raison des restrictions sur les bagages, des modèles de tarification de type aérien et des files d'attente pour embarquer dans les grandes gares.
« Les caractéristiques rachetables comme l'espace généreux pour les jambes et le service client de classe mondiale pourraient être menacées si un opérateur privé prend le contrôle », écrit le groupe de défense.
Le nombre croissant de plaintes de passagers aériens auprès de l'Office des transports du Canada (OTC) n'inspire également pas confiance.
Alternatives aile-fer
En Europe, les alternatives terrestres gagnent du terrain à mesure que les trains remplacent les vols courts entre les villes disposant de liaisons ferroviaires établies (et rapides).
Air Canada semble s'inscrire dans cette tendance, s'associant l'année dernière avec les chemins de fer autrichiens, français, allemands et suisses pour offrir des connexions terrestres en Europe.
« En facilitant l'utilisation du rail pour les segments courts des voyages de nos clients, nous pouvons offrir des options de voyage durables lors de la visite de l'Europe », a déclaré Mark Galardo, vice-président exécutif, planification des revenus et du réseau chez Air Canada, dans un communiqué en décembre dernier lorsque la compagnie aérienne a dévoilé de nouvelles options de réservation aile-fer.
Air Canada a également un partenariat encore récent avec Landline pour offrir des connexions en autocar de marque vers l'aéroport de Toronto Pearson depuis les aéroports de Hamilton et de Waterloo.
En rejoignant l'offre de TGF de Cadence, Air Canada a déclaré que cela « permettrait à la compagnie aérienne de contribuer à l'intégration harmonieuse d'un futur réseau ferroviaire interurbain avec les hubs aéroportuaires existants dans le corridor Québec-Windsor ».
Bien que Transport Action Canada accueille favorablement une meilleure intégration rail-air au Canada, ils se demandent si l'implication d'Air Canada dans l'appel d'offres pour le TGF est même nécessaire.
« Mettre en place des connexions entre une compagnie aérienne commerciale et un chemin de fer public est relativement simple, comme en témoigne le progrès en Europe, et le système de réservation récemment modernisé de VIA Rail utilise un logiciel européen qui a un excellent support pour le faire », écrit le groupe.
« Il y a également des besoins immédiats pour améliorer les services de VIA Rail afin de remplacer les liaisons courtes qu'Air Canada a précédemment supprimées, comme Kingston et Sarnia. »
Quatre préoccupations
Dans un communiqué de presse du 7 août, Transport Action Canada a déclaré avoir contacté Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC), soulevant quatre préoccupations.
Premièrement, le groupe estime que les codes partagés rail-air devraient être disponibles de manière égale pour toutes les compagnies aériennes desservant les aéroports internationaux du Canada. « Si une compagnie aérienne possède une partie du service ferroviaire, des garanties seraient nécessaires pour assurer l'équité », dit le groupe.
Deuxièmement, le groupe affirme que le gouvernement aurait pu donner à Air Canada un accès à des données sur le projet de TGF qui offrent des avantages concurrentiels par rapport à d'autres compagnies aériennes et à VIA Rail.
Troisièmement, permettre à l'un des trois consortiums présélectionnés de révéler des changements majeurs dans sa composition seulement quand il était trop tard pour que les autres réagissent était « injuste », dit le groupe.
Enfin, le groupe affirme que diverses demandes d'information sur le train à haute fréquence – y compris des études financées par les contribuables qui auraient permis un débat public bien informé – ont été « rejetées ou fortement expurgées au cours de la dernière décennie » pour des raisons de sensibilité commerciale.
« Soit les expurgations précédentes étaient fallacieuses, soit des informations sensibles ont maintenant été mises à la disposition d'un concurrent actuel », dit le groupe.
L'organisation a déclaré avoir reçu une réponse de SPAC le 2 août qui n'a répondu que partiellement à ses préoccupations, ajoutant qu'Air Canada et Cadence n'ont pas pu offrir de précisions supplémentaires, citant les règles de passation de marchés.
« Il est crucial que Services publics et Approvisionnement Canada s'assurent que le processus soit entièrement transparent et irréprochable, ce qui est particulièrement important pour la passation de marchés d'un projet de cette envergure et qui est vital pour la future productivité et la prospérité durable du Canada », écrit Transport Action Canada sur son site web.
Le groupe pense qu'Air Canada devrait se retirer complètement pour éviter toute perception supplémentaire de conflit d'intérêts.
Il ajoute « qu'il ne serait pas surprenant que d'autres compagnies aériennes ressentent un traitement préférentiel accordé à l'ancienne société d'État et transporteur national ».